«Je suis Yossef"

   La première chose que le Juif doit rechercher dans sa vie est la suivante : qui est ce « Juste, fondement du monde » dont le véritable mérite permet le maintien du monde. Il faut rechercher ces Justes qui sauvegardent le monde, ces Justes qui nous protègent.


   Dans chacune des trois Parchiot, Vayechev, Mikets et Vayigach, nous sommes à la recherche du
« Juste, fondement du monde », le véritable Juste, Yossef HaTzaddik. Cette semaine dans la Paracha de Vayigach, Yossef s’écrie : « Je suis Yossef ». Le Juste véritable se révèle. Les frères étaient tous de vrais Justes, d’une sainteté supérieure. Mais, ils ne croyaient pas que Yossef était le « Juste, fondement du monde ». Ils se sont trompés au sujet de Yossef. Ils ont cru que Yossef était comme eux. Seulement, il servait Hachem plus qu'eux, il apprenait plus qu’eux, il gardait ses yeux plus qu’eux. Chacun des frères était sûr qu'il était lui-même le véritable Juste. Mais ils ne savaient pas que le « Juste, fondement du monde » c’est quelque chose de complètement différent. Il est au-dessus de toute compréhension, au-dessus de toute forme de compréhension humaine.


   Rabbi Kamarna dans le Houmach « Heihal HaBracha » dit : La lumière de Yossef le Juste éclaire dans tous les mondes et dans toutes les Sefirot. Il illumine le monde entier d'un bout à l'autre. Il éclaire autant que le soleil. Les frères de Yossef n'avaient absolument aucune idée de la puissance de la lumière qui émanait de lui. Comme il est écrit dans le saint Zohar, Paracha Vayechev, Yossef c’est tout, il est la source de tout. Toute l’abondance dans le monde s’écoule à travers lui. Yossef réussissait tout le temps à cacher sa lumière et sa puissance. « Yossef était de belle apparence et beau à voir ». Les initiales de ce verset forment le mot « Yatom », orphelin. Le grand Juste est orphelin. Il est entièrement caché. Il est totalement invisible. Personne ne sait rien de lui. Et c'est ce que Rabbenou rapporte dans Liqoutei Moharan, Livre 2, Torah 77: « Parce qu'il y a un Juste qui est la beauté, la magnificence et la grâce du monde entier, « et Yossef était de belle apparence et agréable à regarder ». « C'est l'aspect de beauté de la vision du monde ». Car le Juste véritable, qui correspond à Yossef, est la splendeur et la beauté du monde entier. Et quand une telle splendeur et une telle magnificence sont révélées dans le monde, c’est-à-dire lorsqu’un tel Juste devient connu et vénéré dans le monde, alors les yeux du monde s’ouvrent... Et celui qui se rapproche et s’attache vers cette grâce véritable, ses yeux s’ouvrent. Et il voit, il regarde en lui-même où il se situe, avec tous ses traits de caractère… Et il peut également voir et constater la grandeur de Hachem ».


   Car le vrai Juste ne vient que pour une seule raison : pour révéler Hachem. Le vrai Juste vient pour révéler que Hachem existe dans le monde. Pour qu’aucune personne ne pense qu'elle agit par sa propre force, qu'on peut marcher, qu’on peut accomplir quoique ce soit tout seul, qu'on peut courir seul, qu'on peut agir seul sans avoir besoin de l’aide de Hachem. Bien qu’ici il reçoit un coup sur sa main. Et là il reçoit un coup sur sa jambe. Il pense encore, je marche, je cours, je fais quelque chose. L’homme pense qu'il dirige le monde, il marche, il respire… On lui montre en une seconde que si une petite chose dans son corps bouge d’un millième de millimètre, alors il est fini ! Immédiatement il a besoin d’examens, de radiographies, d'opérations. Alors seulement il comprend qu'il n'est pas l’Éternel, il n'est pas un ange, il ne gouverne pas le monde.


   La vie nous apprend petit à petit. Une personne est construite à partir d’« ouvertures, de vides. Et il est révélé et connu devant le Trône de Son Honneur que si l'un d'eux s’ouvre, ou si l'un d’eux se bloque, il est impossible d'exister et de se présenter devant Lui, même un seul instant ». Quand une personne atteint la soixantaine, son corps commence à tomber en morceaux : ici un de ses disques se déplace, là un de ses tendons se déplace. À soixante ans, ses jambes commencent à le trahir, ses tendons se durcissent. Jusqu'à l'âge de soixante ans, une personne peut se tromper elle-même. Qu'elle est quelque chose, qu'elle peut tout faire. Mais à cet âge, on constate effectivement qu'on n'est pas du tout quelque chose de spécial. Là je suis tombé, là je ne peux même plus marcher. Mais, qui va pouvoir nous ouvrir les yeux, qui va nous montrer, quand nous sommes encore en bonne santé, forts et puissants, que tout vient de Hachem ? Notre santé vient de Hachem. Notre force vient de Hachem. Tout vient de Hachem. Ce n'est que par le Juste correspondant à Yossef. Lui seul peut nous montrer qu'il y a Hachem dans le monde.


   La seule raison pour laquelle nous venons dans ce monde, c'est pour savoir que nous ne faisons rien. C’est pour savoir que Hachem gouverne tout le monde. Nous ne devons voir que l’Éternel, voir Hachem. Dans toutes les situations, dans chaque mouvement, dans chaque pensée et chaque mot ne voir que Hachem. Une personne déplace sa main ou sa jambe, c’est tout Hachem. C’est Hachem qui déplace son bras. C’est Hachem qui déplace sa jambe. Un homme vit dans le monde, il pense qu'il est un « Hevreman ». Il construit des bâtiments. Il construit des Yeshivot. S'il ne se rend pas compte que c’est Hachem qui fait tout, alors devient une tour de Babel. Comme le dit le roi Chlomo : «J'ai construit un bâtiment, une demeure céleste pour Toi ». Immédiatement Hachem a répondu : « Tu as construit un bâtiment ? Tu l’as construit ? Si c'est le cas, il est déjà décrété que cet édifice sera détruit. Vous devez dire le contraire : « Hachem l'a construit ! Hachem l’a fait ! » Le Maguid de Mezritch raconte une célèbre histoire où il était interdit de dire le mot « je ». Des Justes ont fait attention à ne pas employer le mot « je ». Un homme qui utilise ce mot se met en grande difficulté.


   Toute  la Torah, toute la Guemara et le Choul'han Aroukh, tout le Yoreh Deah, toutes nos prières, tout est seulement pour que nous sachions que Hachem fait tout. Il y a un Dieu dans le monde. Nous ne faisons rien, nous ne bougeons pas une main, nous ne bougeons pas un pied, nous ne respirons pas. « L'âme tout entière loue Dieu, Hallelouyah ». Chaque souffle vient de Hachem. Tout le travail d'une personne jusqu'à ce qu'il soit âgé de cent vingt ans consiste à savoir qui est le Juste dont le mérite diffuse dans le monde entier la vie, dont le mérite dispense l'abondance dans le monde. Comme le raconte la Guemara au sujet de Rabbi Hanina ben Dossa : « Le monde tout entier subsiste grâce au  mérite de mon fils Hanina, mais Hanina lui se contente d'une partie de caroubes ». La première chose qu'un Juif doit savoir c'est sur quoi le monde repose ? Par le mérite de qui vient la subsistance du monde ? Il doit rechercher et il doit trouver quel est ce Juste dont le mérite permet au monde d’exister. Quels sont ces Justes qui nous protègent ?


   « Et quiconque se rapproche de ce Juste, toute personne qui est vraiment attachée à ce Juste, il peut voir où il se tient dans la réparation de ses traits de caractère » (Likoutei Tefilot 77). La preuve qu'une personne a trouvé le Juste, c'est lorsqu'il commence à détester le mal en lui, ses mauvais penchants et tout le matérialisme qui l'entoure. Il hait le corps, les mauvaises choses, tous les désirs de ses bas instincts. Au moins, il ne les prend pas pour son idéal, il n'est pas fier d'eux. Dès le moment où une personne se rapproche du vrai Juste, il ne recherche que les bonnes choses, il ne voit que le bien dans chaque personne, et il commence à aimer le peuple d’Israël. Il les aime et il est prêt à se sacrifier en faveur de tous. Il veut seulement sortir de tous ses mauvais traits de caractère, de tous ses instincts. Il veut mériter de faire une Techouva complète pour la sanctification de Hashem.


   « Parce que ce véritable Juste a le pouvoir de réparer le monde tout entier ». Parce que ce Juste peut ramener tout le monde dans la bonne voie. Si les gens se rapprochaient de lui et croyaient en lui, ils sortiraient de tout le mal qui est en eux, ils seraient totalement purifiés. Car ce Juste est déjà sorti des quatre éléments. Il a déjà purifié les quatre éléments. Il est déjà libéré de tous les instincts. Il peut purifier n'importe quelle personne dans le monde du mal en lui, de ses mauvais penchants. C'est ce qu’a dit le Gaon Rabbi Meir Simcha HaCohen de Dvinsk (auteur du " Ohr Same'ach " sur le Rambam) sur la Guemara Sota (13a): « Et là, ils ont tenu une grande et imposante oraison » (Berechit 50:10 ). « Il a été enseigné : même les chevaux et même des ânes ». Rabbi Meir Simcha HaCohen a dit : « une grande et imposante oraison », même les chevaux ont fait l’éloge de Yaakov Avinou. Il y a eu une telle grande et imposante oraison que même les chevaux ont pleuré, même les ânes ont pleuré, tout le monde a pleuré le Juste. Les chevaux ont ressenti que le Juste avait disparu. Même les ânes ont ressenti cette disparition. « Le bœuf reconnaît son propriétaire, l'âne l’abreuvoir de son maître. Mais les enfants d'Israël ne savaient pas, mon Peuple n’en tint pas compte ». Les chevaux reconnaissent le vrai Juste. Les ânes reconnaissent le vrai Juste. C'est effectivement une honte et une désolation que les gens ne reconnaissent pas le Juste. Comment peut-on être aussi aveugle ? On se déplace partout dans le monde sans savoir qui est le vrai Juste.


   L’homme, avec tout son orgueil, avec tous ses mauvais penchants, ne veut pas croire dans le Juste. Il ne veut pas savoir qui est le Juste. Mais les chevaux et les ânes ont ressenti qu'ils étaient perdus sans le Juste. Qui soutiendra le monde ? Qui les protégera ? Qui va veiller sur les chevaux ? Qui gardera les ânes ? Qui va protéger le monde ? Ils ont su à qui revient le mérite d’être vivant. Si le Juste n'existe pas, alors il y aura une famine, il y aura une Shoah dans le monde, il y aura des guerres. C'est ce que dit Rabbi Meir Simcha HaCohen : commence à voir les Justes, commence à suivre les Justes. Ouvrez les yeux, voyez qui est le Juste par le mérite de qui vous êtes en vie.

 

Biur Pnei Melech Haim


   Rabbenou a déclaré qu'« une personne doit s'aimer elle-même avec Hachem, une personne doit s'aimer elle-même avec le Juste ». Cela est difficile à comprendre. Qu'est-ce que ça veut dire «  s'aimer soi-même avec le Juste ? ». Pourquoi Rabbenou ne dit-il pas simplement « aimer le Juste » ? Il s'agit ici d'un concept extrêmement profond. Une personne a besoin d'apprécier ces moments où il se sent relié à Hachem. Lorsque vous vous connectez avec le Juste, vous vous connectez à ces moments-là. C’est le moment où tout à coup vous prenez conscience que vous n'êtes rien. Vous vous rappelez qu'il y a vraiment tellement d'amour en vous-même quand vous êtes avec Hachem. Il y a tellement à aimer quand vous êtes avec le Juste. En d'autres termes, c’est quand vous aimez cette douceur qui se trouve dans votre âme, même si elle est cachée, même si vous êtes confus, même lorsque vous ne voyez rien, tout est noir devant vous. Rappelez-vous qu'il y a une telle notion d’être avec Hachem. Rappelez-vous ceci, et aimez ça.


   Cela rappelle le récit du « maître de la prière ». Dans cette histoire, il y a un fidèle ami du roi. Il avait avec lui des portraits où il était ensemble avec le roi. Partout où il allait, il embrassait ces images de lui avec le roi. Ce n'étaient pas des images du roi tout seul. Comme quand on embrasse un Sefer Torah, une Mezouza, ou un livre de Tehilim. Non, il ne se suffisait pas de cela. Il voulait des photos où il était photographié ensemble avec le roi. Cela signifie que nous devons nous attacher à ces expériences, à ces moments de connexion. De sorte que dans les moments d'obscurité nous restions attachés au roi. C'est ce qu'on appelle un « ami fidèle ». Sa fidélité est sa relation avec le roi. Cela est représenté par l'image qu'il a toujours avec lui et qu’il embrasse. Si une personne s’attache à cela, elle voit combien cela est doux, combien cela est merveilleux ! Alors même si vous faites quelque chose de stupide, ou si maintenant vous n'avez pas beaucoup de succès dans l’éducation de vos enfants, ou dans votre mariage, ou que vous ne priez pas bien, vous pouvez toujours vous dire : « Je t'aime tellement Hachem. J'aime tellement la sainteté ! J'aime tellement ces moments exceptionnels de connexion. C'est quelque chose qui est en moi. Elle fait partie de moi. Donc, je dois aimer cela. Je dois placer cela en face de moi. Même si ces moments sont rares, même s’ils sont courts. Mais, si nous aimons vraiment cela, nous allons cesser d'aimer d'autres choses. L'amour est singulier, est unique. Il est impossible d'être connecté à ce doux point et d'être attaché en même temps à d'autres choses. À des choses qui ne conviennent pas. Si une personne s’attache vraiment à ces moments-là de vérité, s’il ressent combien ces moments lui sont agréables, alors, durant tout le jour où elle se retrouve perdue dans le chaos de la vie quotidienne, elle se souvient de ces moments d'amour. Et s'il oublie, alors il doit garder cela. Pour l'ami fidèle, il y avait dans sa poche des photos de lui avec le roi. Et chaque fois qu'il ressentait un quelconque éloignement, il prenait ces photos, il les regardait et il les embrassait. Il embrassait ces instants où il s’aimait lui-même avec le roi.


   Lorsque je suis avec le roi, alors c'est ma grandeur. Je peux m'apprécier moi-même. Ce n'est pas que je suis indigne. Je ne suis pas dans un tel bas état. Je ne suis pas tellement inférieur. Je ne suis pas tellement tombé de la mesquinerie. J'ai élargi ma conscience. Être ensemble avec le roi c’est un élargissement de la conscience.


   Je me connecte avec le point de « il n'y a rien d’autre que Hachem ». Cela se trouve en moi. C’est aussi ce point de « il n'y a rien d’autre que Hachem » qui se trouve dans mon ami. « Il n'y a rien d’autre que Hachem » signifie qu'il n'y a absolument rien d’autre. La seule chose qui existe c’est l'étincelle de l’Éternel qui est connectée à « il n'y a rien d’autre que Hachem ». C’est cette partie d’étincelle qui se trouve au-dessus de nous que nous devons commencer à aimer, à embrasser, à étreindre, à nous connecter vers elle, à croire en elle. Nous devons savoir que c'est la source de notre vie. Lorsque nous sommes confus, nous devons sortir cette photo de notre poche, comme sortir de nos expériences et nous reconnecter. Nous n’existons que dans la mesure où nous sommes inclus dans l'existence éternelle de l’Éternel.

 

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